13  Modèles paramétriques

Objectifs: présenter, assez rapidement, la logique des modèles de type AFT (Accelerated Failure Time), principalement celui de Weibull.

13.1 Principes

  • Dans les modèles paramétriques usuels1 ,la durée de survie est distribuée selon une loi dont la densité \(f(t)\) pleinement paramétrée.
  • Pour utiliser l’approche paramétrique, il faut avoir de bonnes raisons de penser que les durées de survie sont distribuées selon une certaine loi connue plutôt qu’une autre.
  • La majorité des distributions reposent sur une hypothèse dite AFT (**Ac r la proportionnalité des risques. Certaines modèles peuvent reposer sur les deux comme le modèle de Weibull. Enfin, les modèles log-logistique ou log-normal n’ont qu’une paramétrisation de type AFT. Depuis une vingtaine, un modèle dit flexible (Parmar-Royston) ne paramétrise pas la distributions des évènement à partir d’une loi mais à partir d’un ajustement reposant sur la méthode de lissage par spline cubique2.

13.2 Hypothèse AFT: Accelerated Failure Time

L’hypothèse AFT signifie que l’effet des covariables est multiplicatif par rapport à la durée de survie/séjour. Par opposition, les modèles PH décrivent un effet multiplicatif par rapport au risque.

Selon les caractérisques des individus, le temps ne s’écoulent pas à la même vitesse, ils ne partagent donc plus la même métrique temporelle. Cela renvoie a des interprétations de type dilation/contraction du temps, par analogie à la théorie de la relativité, mais ici avec une seule dimension.

Exemple simple: la durée de vie d’un être humain et d’un chien.
On dit qu’une année de vie d’un être humain est équivalent à 7 années de vie d’un chien. C’est typiquement une hypothèse d’AFT.

\(S_h(t) = S_c(7\times t)\).

C’est ce facteur multiplicatif qu’estime un modèle paramétrique de type AFT.

\[S(t_i | X_1)= S(\phi t_i | X_0)\]

Remarque: si un modèle s’estime AFT s’estime également sous hypothèse PH, comme celui de Weibull: \(h(t_i | X_1)= -\rho \phi h(t_i | X_0)\)

  • Avantage: l’interprétation des modèles est directement liée aux fonctions de survie. Cela s’avère donc pratique après une analyse non paramétrique de type Kaplan-Meier par exemple.
  • Inconvénient: très difficile d’introduire de variables dynamiques3.

Humain versus chien: la probabilité qu’un être humain survive 80 ans est égale à la probabilité qu’un chien survive 11 ans (80/7). Le temps s’écoulerait donc plus vite pour le chien que pour l’être humain du point de vue d’un référentiel extérieur. Ce raisonnement peut s’appliquer aux quantile du temps de survie: le temps de survie médian d’un être humain est 7 fois plus élevé que celui d’un chien. En terme d’interprétation des paramètres estimés, si la durée de survie est plus courte, alors le risque est plus élevé.

13.3 Principe de construction des modèles AFT

Le raisonnement mathématique est ici plus complexe que pour les modèles de Cox ou à durée discrète. On donnera juste quelques pistes en début de raisonnement. On part d’une expression proche du modèle linéaire à une transformation logarithmique près de la variable dépendante. En imposant la contrainte \(t_i>0\), en ne posant qu’une seule covariable \(X\) de type binaire, et en se situant de nouveau dans une logique de temps continu (pas d’évènement simultané):

\[log(t_i)= \alpha_0 + \alpha_1X_i + bu_i\]

\(b\) est un paramètre d’échelle identique pour toutes les observations et \(u_i\) un terme terme d’erreur qui suit une loi de distribution de densité \(f(u)\). Cette combinaison linéaire définira le paramètre de position. C’est la forme de \(f(u)\) qui définie le type de modèle paramétrique.

On peut écrire: \(f(u_i) = f(\frac{log(t_i)- \alpha_0 - \alpha_1X_i}{b})\).

Remarque: pour une distibution normale/gaussienne, le paramètre de position est l’espérance et le paramètre d’échelle l’écart-type.

13.4 Quelques modèles paramétriques usuels

Modèle exponentiel et de Weibull

Weibull

  • Peut estimer un modèle PH ou AFT, d’où sa popularité.
  • Distribution monotone des durées d’évènement, toujours croissante ou décroissante.
  • \(f(t)=\lambda\alpha t^{\alpha - 1}e^{-\alpha t^\lambda}\) et \(h(t)=\lambda\alpha(\lambda t)^{\alpha - 1}\), \(\alpha>0\) et \(\lambda>0\). Si \(\lambda>1\) le risque est croissant, décroissant si \(\lambda<1\), et est constant (loi exponentielle) si \(\lambda=1\).

Exponentiel

  • Processus sans mémoire, utilisé pour étudier par exemple la durée de vie composants électriques ou électroniques.
  • La fonction de risque est une constante.
  • Cas limite de la loi de Weibull. Un modèle de type exponentiel peut-être de type AFT ou PH.
  • Pour contourner la constance du risque dans le temps, on peut estimer un modèle en scindant la durée en plusieurs intervalles. Le risque sera constant à l’intérieur de ces intervalles, il s’agit d’un modèle “exponential piecewise” (exponentiel par morceau).

Log-logistique

  • Estime un modèle de type AFT seulement. Proche du modèle log-normal (plus difficile à estimer).
  • Permet une interprétation en terme d’Odds de survie.
  • La fontion du risque peut-être “U-shaped” (unimodale croissante puis décroissante).

Autres lois: Gompertz (PH seulement), Gamma et Gamma généralisé…..

Sélection de la loi On peut sélectionner la loi en comprarant les AIC où les BIC des modèles. Pour le modèle de Weibull, on peut regarder s’il ajuste bien les données si la transformation \(log(-log(S(t_i)))\) est linéaire par rapport à \(log(t_i)\).

Application

Comparaison des AIC (sans covariable)

  • Weibull: 400.1
  • Exponentiel: 461.0
  • Gompertz: 409.6
  • Log-logistique: 391.8

13.5 Exemple avec le modèle de Weibull

Table 13.1: Modèle de Weibull
(a) Accelerated Failure Time (AFT)
Variables Time Ratio p>|z| 95% IC
\(year\) 1.176 0.184 0.926 - 1.493
\(age\) 0.940 0.013 0.896 - 0.987
\(surgery\) 7.173 0.011 1.557 - 33.048
\(\rho\) 0.556 - 0.464 - 0.667
(b) Proportional hazard (PH)
Variables HR p>|z| 95% IC
\(year\) 0.914 0.175 0.802 - 1.041
\(age\) 1.035 0.014 1.007 - 1.063
\(surgery\) 0.334 0.012 0.143 - 0.783
\(\rho\) 0.556 - 0.464 - 0.667

Note: la constante n’est pas reporté. \(\rho\) indique la valeur estimé d’un paramètre de forme. Son signe indique sur le risque est décroissant ou croissant (1 si risque constant), et permet de passer de la paramétrisation AFT à la paramétrisation PH (et inversement).

  • AFT: Un jour de survie d’une personne qui n’a pas été opérée d’un pontage correspond environ à 7 jours de survie d’une personne opérée. Cette remise à l’échelle de la métrique temporelle entre les deux groupes exprime bien le gain en durée de survie pour les personnes opérées, soit des risques journaliers de décès plus faibles (et plus faibles à valeurs constantes, proportionnalité oblige).

  • PH: Lecture en rapport de risque ou hazard rate (idem Cox). Si on avait reporté les coefficients (échelle log) \(b_{ph} = -\rho \times b_{aft}\). Ici \(-0.556 \times (1.97) = -1.096\). Et \(e^{-1.096}=0.334\)

Attention: on ne peut pas comparer la qualité d’un modèle paramétrique à celle d’un modèle de Cox par des critères type AIC ou BIC. Les deux méthodes d’estimation diffèrent.

13.6 Le modèle de Parmar-Royston

  • Le bon ajustement par une loi de distribution predéfinie peut s’avérer contraignante. Le modèle de Cox avait justement pour objectif de se défaire de cette contrainte, la plupart des distributions utilisées étant monotone ou unimodale (log-logistique ou log-normal).
  • Le principe des splines peut-être rapproché de celui qui a été utilisé plus haut dans le modèle logistique à durée discrète avec l’introduction des polynomes [ \(f(t)= (a_1\times t) + (a_2\times t^2) + (a_3\times t^3) + ...+ (a_k\times t^k)\).
    • Cette méthode brute d’ajustement consiste finalement à introduire une intéraction ou plusieurs intéractions entre la variable de durée elle-même.
    • L’ajustement par des polynomes classiques est très sensible aux outliers (overfitting) au delà de \(k>2\) 4.
  • Du côté des splines cubiques la méthode d’ajustement et de lissage est de meilleure qualité et permet de mieux contenir les problèmes d’overfitting.
    • les splines cubiques sont donc basées sur des polynomes d’ordre 3 (d’où cubique) avec une estimation par morceau (intervalles). les morceaux sont définis manuellement ou par un nombre de degrés de liberté obtenu à partir des quantiles du logarithme de la fonction de survie après avoir exclu les observation censurées.
      • Deux degrés de liberté (1 noeud) avec un intervalle allant jusqu’au log de la moitié des survivants et un second à partir de cette seconde moitié.
      • Sur le même principe trois degrés de liberté (2 noeuds) coupe la durée en 3 intervalles sur ses terciles.
      • En pratique, il est préférable de donner à l’application le nombre de degré de liberté plutôt que d’indiquer manuellement la position des noeuds.
      • Il convient également de ne pas être trop gourmand sur le nombre de noeuds, un ou deux étant souvant suffisant (donc 2 ou 3 degrés de liberté).
      • On peut choisir le nombre de degrés de liberté en estimant des modèles sans covariable et comparer les AIC (vraisemblance pénalisée).
  • Contrairement aux autres modèles, et sans rentrer dans les détails, le modèle de Parmar-Royston part de la fonction de risque cumulée et non des taux de risque/hasard. Les risk ratios sont obtenus en utilisant les relations entre les différentes grandeurs (voir section théorie).

Exemple

Avec 2 degrés de liberté (un noeud):

Modèle de Parmar-Roytston
Variables $e^(b) p>|z| 95% IC
\(year\) 0.885 0.067 0.777 - 1.008
\(age\) 1.030 0.026 1.004 - 1.058
\(surgery\) 0.373 0.025 0.159 - 0.876
\(spline 1\) 3.157 0.000 2.503 - 3.981
\(spline 2\) 1.289 0.002 1.099 - 1.511
\(constante\) 0.510 0.000 0.386 - 0.674

A savoir:

  • Avec un degré de liberté, le modèle de Parmar-Royston estime un modèle de Weibull sous paramétrisation PH.
  • Les paramètres pour les splines ne sont pas interprétables directement. Ils servent calculer la baseline du risque via l’équation du polynome (non reporté car expression bien corsée).
  • De nouveau il s’agit d’un modèle à risque proportionnel.

  1. Plus anciens que le modèle de Cox↩︎

  2. permet un ajustement relativement proche des modèles à durée groupée mais avec des durées strictement continues↩︎

  3. Jamis testé de mon côté↩︎

  4. lors la formation il suffit de la tester avec la base des TP pour k=3 et calculer la probabilité conditionnelle pour s’en convaincre↩︎